Tenségrité & Biotenségrité
La notion de tenségrité est l’une des idées les plus élégantes et révolutionnaires pour comprendre la structure du vivant. Son nom provient de la contraction des mots tension et intégrité, inventée par l’architecte et visionnaire américain Buckminster Fuller.
À l’origine, la tenségrité est un principe architectural. Elle décrit des structures constituées :
- d’éléments rigides (tiges), soumis à des forces de compression,
- d’éléments souples (câbles), soumis à des forces de tension.
Ces structures, dômes, ponts, sculptures, se stabilisent non pas grâce à la résistance individuelle de chaque composant, mais grâce à l’équilibre global des forces qui se répartissent dans tout le système.
Lorsque l’on tire sur un élément, l’effet se transmet partout. Une modification locale produit une réorganisation globale.
C’est cette idée qui rend la tenségrité si précieuse pour comprendre le corps humain.
DE LA TENSÉGRITÉ À LA BIOTENSÉGRITÉ
Lorsque ce principe est transposé au vivant, on parle de biotenségrité.
Le corps humain n’est pas une machine faite de pièces mécaniques articulées entre elles ; c’est un système dynamique, continu, inter-relié.
La biotenségrité représente donc le modèle le plus juste pour comprendre comment notre corps s’organise et se stabilise, du niveau microscopique jusqu’au mouvement global.
✔ Les os : les éléments de compression
Ils agissent comme des “tiges” internes. Contrairement à ce que l’on imagine souvent, ils ne s’empilent pas les uns sur les autres comme des briques : ils sont suspendus dans un réseau de tensions.
✔ Les fascias, muscles et tendons : les éléments de tension
Ils forment un maillage continu, un tissu ininterrompu qui enveloppe, relie et soutient toutes les structures internes. Ce système de tension continue et de compression discontinue crée un corps :
- élastique,
- stable,
- autoporté,
- capable de s’adapter instantanément au mouvement, à la gravité, à la charge et à la posture.

LE CORPS COMME UNE STRUCTURE DYNAMIQUE
L’un des principes centraux de la biotenségrité est que le corps fonctionne comme un tout.
Une force appliquée quelque part se répercute partout :
- Une tension dans la cheville peut modifier le genou.
- Une raideur dans le diaphragme peut influencer les cervicales.
- Un mouvement doux dans le bassin peut alléger les épaules.
C’est le jeu permanent de poids et contrepoids qui crée l’équilibre.
Quand une zone se tend, une autre se détend.
Quand une partie se charge, une autre compense.
Le vivant n’est jamais figé : il réorganise sans cesse ses forces internes.
Cette compréhension change complètement notre vision du mouvement :
nous ne “tenons pas debout” par rigidité, mais par ajustement intelligent.
BIOTENSÉGRITÉ & MOUVEMENT : UNE DANSE INTERNE
Dans le mouvement, la biotenségrité permet :
- une répartition efficace des forces (plutôt qu’un stress localisé),
- une adaptation instantanée à la gravité,
- une réponse fluide aux micro-perturbations,
- une stabilité sans rigidité,
- une liberté articulaire,
- une économie musculaire (moins de compensation, moins d’effort inutile).
C’est pourquoi les pratiques lentes, multidirectionnelles, spiralées ou au sol favorisent une réorganisation profonde : elles laissent le système s’auto-réguler.
LE RÔLE ESSENTIEL DES FASCIAS
Les fascias, tissus conjonctifs qui enveloppent tout dans le corps, sont les véritables “câbles” de cette architecture biologique. Ils :
- transmettent les forces à travers le corps,
- assurent la continuité du mouvement,
- participent à la proprioception,
- stockent, libèrent ou redistribuent la tension,
- s’adaptent à la contrainte (ils se densifient ou se liquéfient selon l’usage),
- coordonnent les ajustements posturaux en temps réel.
Ils sont les chefs d’orchestre silencieux de notre équilibre.
EXEMPLES D’APPLICATION DANS LE CORPS
Prenons des gestes simples :
✔ Se pencher en avant
Le poids part vers l’avant → les tissus à l’arrière (mollets, ischios, dos) créent le contrepoids. L’ajustement est global, pas local.
✔ Lever un bras
Le bras ne travaille pas seul : le tronc, le bassin, la colonne ajustent leurs tensions pour maintenir la stabilité.
✔ Marcher
Chaque pas redistribue les forces dans tout le réseau fascial.
La fluidité vient de la capacité du système à absorber, amortir et renvoyer les forces.
LE MUNZ FLOOR : UNE APPLICATION DE LA BIOTENSÉGRITÉ (EN BREF)
Le MUNZ FLOOR illustre parfaitement l’usage de la biotenségrité. Allongé au sol, grâce aux spirales lentes et à une lenteur hors norme, le corps joue avec le poids et le contrepoids sans charge gravitaire excessive. C’est cette association qui permet :
- la décompression naturelle de la colonne,
- la libération douce des articulations,
- la redistribution harmonieuse des tensions,
- la réhydratation et la dédensification des fascias ( ils peuvent se liquéfier, générer la production de protéines tonifiantes, hydratantes, assouplissante, régénérantes...)
- le retour d’un mouvement plus fluide et équilibré.
Le MUNZ FLOOR n’agit pas par la force, mais par la coopération interne : il laisse la biotenségrité faire son travail.
La biotenségrité nous invite à voir le corps non comme une machine segmentée, mais comme un système vivant, cohérent, interconnecté.
Un corps qui trouve sa stabilité non dans la rigidité, mais dans l’ajustement constant.
Un corps capable de se libérer, se réorganiser et se renforcer à travers le mouvement.